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Pesticides dans l’eau potable : 60 millions de consommateurs tire la sonnette d’alarme

Les rapports de l’Agence de sécurité sanitaire sont inquiétants : parmi les prélèvements effectués pour estimer la qualité de l’eau potable, 33 % d’entre eux ne sont pas conformes en raison d’un surdosage de métabolite de chlorothalonil, un fongicide réputé comme cancérogène et interdit depuis plus de 3 ans. Le magazine 60 millions de consommateurs nous aide à faire le point sur cette affaire.

Illustration : "Pesticides dans l’eau potable : 60 millions de consommateurs tire la sonnette d’alarme"

Un pesticide qui met du temps à disparaître

Certes, le chlorothalonil a été interdit à la suite d’une publication de 2019 qui attestait de sa présence dans les eaux de consommation suisses. Si la mesure n’a pas attendu longtemps pour s’appliquer, certains métabolites de chlorothalonil contaminent l’environnement pendant plusieurs années même après l’interdiction d’usage de la substance. C’est le constat dressé par l’Anses, l’agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail.

C’est également le cas pour un herbicide, l’atrazine, qui n’est plus autorisé en France depuis plus de 20 ans. Pourtant, nous retrouvons encore aujourd’hui des métabolites (des composés de la substance) dans l’eau. Par conséquent, ces rapports de l’Anses viennent étoffer la liste des molécules à surveiller. Un problème épineux en plus d’être essentiel, car encore récemment, en 2021, le journal Le Monde rapportait que 20 % des Français buvaient une eau non conforme, toujours en raison de la présence de ces pesticides qui s’étallent dans le temps à des concentrations trop élevées.

Un défi pour les communes

En Lausanne (Suisse), il a été possible de compenser ces relevés d’eau inappropriés avec l’eau du Lac Léman. En revanche, toutes les communes ne disposent pas d’un système d’approvisionnement alternatif. Le combat pour la qualité de l’eau est donc loin d’être remporté, d’autant plus que certains herbicides controversés sont encore en usage, comme le S-métolachlore, utilisé sur le tournesol, le soja et le maïs. Le ministre de l’agriculture, Marc Fesneau, a fait repousser son retrait sous prétexte d’assurer la « souveraineté alimentaire » française. Il faut espérer que ses calculs sont bons et que les bénéfices apportés par l’usage de cette molécule ne soient pas accompagnés de conséquences néfastes pour la population.

Heureusement, parmi ces molécules détectées, certaines sont seulement suspectées d’être nocives. De plus, toutes les concentrations mesurées, si elles révèlent bien la présence de pesticides, d’herbicides ou de fongicides, sont en dessous de la limite maximale. L’eau potable française ne s’est donc pas changée en puits empoisonné. Ce rapport permet surtout d’améliorer la précision des études de qualité futures.

Un combat de longue date

La présence de résidus dans l’eau potable est un sujet qui a plus de 10 ans. Qu’il s’agisse de pesticides ou de médicaments, la documentation de ces substances est longue et est menée de façon continue. Si parmi elles, il y a des noms inquiétants comme le 1,4-dioxane, un solvant cancérogène, les traces sont heureusement infimes. En effet, la substance a été détectée dans seulement 8 % des cas alors que le seuil de détection utilisé était particulièrement bas. Il n’y a donc pas de danger dans l’immédiat.

Historiquement, la France est un pays qui a une eau contaminée depuis plus d’un siècle par des résidus d’explosifs. Il s’agit de la conséquence des deux guerres mondiales. L’activité militaire à cette époque a été tellement élevée qu’une grande diversité de matières chimiques se sont intégrées dans l’environnement. Par exemple, nous retrouvons des molécules de la famille du TNT dans le Grand-Est ou encore les Hauts-de-France. Du côté de la Nouvelle-Aquitaine et de l’Occitanie, ce sont les explosifs HMX et RDX qui sont présents, vestiges de la seconde guerre mondiale.